Notre série d’interviews consacrée aux anciens se poursuit avec Brice VDH, vidéaste et monteur qui réalise les clips d’artistes comme Julien Doré, Angèle, Clara Luciani, Big Flo et Oli, etc.
Bonjour Brice, merci pour l’interview. Commençons par ton parcours à l’IAD. Tu es un ancien de multimédia, non ?
Oui. Je suis arrivé au tout début, quand l’orientation multimédia se lançait. Je suis arrivé à l’IAD par hasard, un peu sur un malentendu. En sortant de rhéto, je voulais faire des sites Internet. Je n’avais pas bien compris qu’il y avait beaucoup d’autres choses: du montage, de la vidéo, de la 3D, de l’animation, du dessin, du son, des effets spéciaux, etc.
Je me souviens avoir un peu improvisé mon épreuve d’admission mais c’est passé, malgré pas mal de baratin. J’ai découvert le programme des cours à la rentrée (rires). Ce qui m’a tout de suite plu, c’est le fait qu’on touchait un peu à toutes les disciplines, qu’on pouvait expérimenter, bricoler, qu'on avait du matériel à disposition.
J’ai vite compris que ce qui m’intéressait c’était la vidéo. A l’époque, on avait encore des cours de montage sur de la pellicule! J’ai acheté une paire de gants blancs, un crayon blanc chez Schleiper et je m’y suis mis. C’était une bonne entrée en matière mais le processus était tout sauf fluide. Le montage sur ordinateur, les effets, After Effect c’est quand même plus fun.
J’ai fait un travail de fin d’études en 3D qui a été super bien noté. Il ne me restait que mon mémoire à écrire en seconde session … ce que je n’ai jamais fait … puisque j’ai trouvé mon premier job pendant les vacances d’été.
Raconte-nous ça si tu veux bien. C'est toujours intéressant les premiers jobs
Elle est rigolote cette histoire. Pendant les vacances, je conduis une amie graphiste à une interview qu’elle passait chez Plug TV (PlugRTL). Dans le couloir, entre deux portes, je croise Olivier Pairoux, qui était directeur artistique à l’époque. Il avait fait l’IAD en réalisation et je le connaissais. Il m’a dit qu’ils cherchaient des monteurs. J’ai été engagé et j’ai commencé en septembre.
Comme c’était une (très) petite équipe, il fallait faire un peu de tout: montage, habillage de chaîne, réalisation d’émission, etc. On avait des moyens, un studio tout neuf et une équipe super motivée. C’est vraiment là que j’ai fait mes armes, que j’ai découvert plein de choses et continué à expérimenter. On avait une émission tous les soirs et il fallait que cela roule, mais il y avait une ambiance de grande cour de récré.
Après 5 ans chez RTL, je suis parti avec une collègue pour fonder une petite ASBL. J’aimais beaucoup la musique, j’étais pote avec les Girls in Hawaii et quelques autres musiciens. Pendant 3 ou 4 ans, on a fait des interviews d’artistes, on a filmé des sessions musicales, etc. On ne gagnait pas super bien notre vie mais c'était pas très grave.
C’est comme cela que tu as commencé à faire des clips?
En fait, chez Plug, j’avais monté la version belge de la Nouvelle Star. On avait été invité pour la finale, les petits fours et le champagne à Paris. C’est là que j’ai rencontré Julien Doré. On est allé boire quelques bières ensemble dans un café pas loin. Il est venu à Bruxelles en tournée, on a re-bu quelques bières et il m’a proposé de faire un clip. Je n’y connaissais rien mais j’ai dit oui. J’ai foncé à la FNAC acheter un caméscope pour touristes et on a bricolé un clip pour “Les bords de mer”.
La qualité d’image n'était pas terrible, il y avait plein d’artéfacts, du macroblocking dans tous les sens, un étalonnage à l’arrache mais, finalement, grâce à beaucoup de chipotages et à l'ajout d’un peu de grain, cela passait. Julien et moi, on ne s’est plus quittés depuis.
C’est marrant parce qu'avec le recul, je me rends compte que c’est comme ça que je fonctionne le mieux. J’ai bossé avec des plus grosses équipes, dans de plus grosses productions mais ce que je préfère c’est toucher à tout, expérimenter, etc. Pour moi, le clip c’est un espace de liberté, un laboratoire.
Le côté humain, les rencontres sont aussi très importantes. Les artistes avec lesquels je travaille, je les connais et eux aussi. Ils sont d’accord pour travailler avec moi et avec ma façon de bosser. On a d’abord une relation humaine avant de faire un clip ensemble.
Je travaille avec Angèle mais je la connaissais déjà auparavant et on s’entend bien. Je ne pense pas qu’on aurait pu faire ensemble son clip pour “Tout oublier” en allant à quatre sur une plage en Espagne avec deux combinaisons de ski et très peu de matos si on ne se connaissait pas.
Je crois que ce clip a bien marché et a gagné une victoire de la musique parce que cette complicité, cette simplicité, ce côté "bricolage maîtrisé” et un peu décalé sont visibles à l’écran. Finalement, je crois que c’est cela qui touche le public, sans doute plus que la qualité des images.
Je me répète mais ce que j'aime dans les clips c’est de pouvoir toucher à tout. Je dis souvent en rigolant que mon but c’est d’arriver à la retraite en sachant tout faire.
J’ai quelques autres projets dans les cartons: j’expérimente avec le son, j’aimerais bien faire un film de fiction un jour (même si je ne sais pas si j’en serais capable), etc.
Est-ce que tu as quelques conseils pour les jeunes générations ?
Ne faites pas votre mémoire (rires) ? Plus sérieusement, profitez de toutes les opportunités: si vous pouvez faire une vidéo, des VFX, un site web ou n’importe quoi d’autre, faites-le. Même si cela ne vous rapporte pas grand chose dans un premier temps, cela vous permet de faire des rencontres, d’apprendre de vos erreurs, d'expérimenter.
Je vous souhaite simplement de découvrir ce que vous aimez, ce qui vous intéresse. J’ai eu la chance que cela m’arrive et je dois encore me pincer tous les matins: pouvoir vivre de ma passion, me lever tous les jours pour faire quelque chose qui me plaît vraiment, c’est juste génial!